Sur la route de la légalisation – Voyage à Denver, jour 2

Culture intérieure au 3D Cannabis Center de Denver. Photo: Hugô St-Onge.
Le 3D Cannabis Center de Denver.
Code-barres servant à l'indentification individuelle des plants.
Réunion de la Marijuana Enforcement Division (MED)
La terrasse du Denver Puppet Theater.

Après un nuit de repos bien mérité, Félix Séguin (le journaliste de TVA) et moi sommes allés au bureau de la Marijuana Enforcement Division of Colorado’s Department of Revenue (MED), afin d’assister à la toute première réunion du Groupe de travail chargé de la mise en place du Marijuana Inventory Tracking System, sorte de «Big Brother du cannabis» implanté par la compagnie METRC. Ce système doit faire l’inventaire en temps réel de chaque plant de cannabis mis en production. Vous avez bien lu : l’État du Colorado vise à contrôler chaque brindille d’herbe cultivée légalement à l’aide d’un code-barres distinct.

À mes yeux, il s’agit du nouveau visage de la prohibition. Le Colorado a donné naissance à une entité régulatrice omnipotente, qui cherche en quelque sorte à justifier son existence en élargissant son champ de responsabilités – comme toute administration ou force policière devant justifier ses budgets. Outre la collecte et le contrôle des sommes recueillies par les revendeurs autorisés, quel est donc l’intérêt de la MED ? Les amateurs de cannabis ne semblent pas faire partie de ses préoccupations, puisque tout est fait pour récolter facilement les taxes alors que le contrôle sanitaire demeure sur une voie de service...

Code-barres servant à identifier individuellement les plants de cannabis

Je ne veux pas d’un tel scénario au Québec. Je ne veux pas que Revenu Québec soit l’agence en charge de mon herbe ni de celle des autres amateurs. Ce type de légalisation est un piège prohibitionniste, car elle tente de remédier, par un contrôle excessif, aux peurs irrationnelles que la prohibition et sa propagande ont suscité dans l’opinion publique.

Après un petit détour au Capitole de l’état du Colorado, nous nous sommes rendus au Denver Puppet Theater, un café-théâtre doté d’une jolie terrasse, afin d’y rencontrer Greg Duran, un militant pro-marijuana qui allait devenir notre guide. Greg est un ancien employé de l’armée américaine devenu très critique envers le gouvernement. Félix a réussi à en tirer une entrevue très émouvante.

Ce que je retiens de ma rencontre avec Greg, c'est que pour lutter contre la prohibition du cannabis, il faut du courage et de la ténacité. Cela dit, sur une note moins personnelle et plus générale, Greg représente bien l'esprit autonomiste qui a animé le Colorado et a permis de faire adopter l’Amendement 64. On retrouve ce même esprit au Québec, bien qu’il soit trop dispersé actuellement pour changer les lois régissant le cannabis.

En 2012, la population du Colorado a réussi à percer une première brèche dans le mur de la prohibition. Selon Greg, il faudra poursuivre la lutte au cours des prochaines années, car l’Amendement 64 n’a pas réussi à résoudre l’ensemble des questions qui ont fait surface lorsque l’Amendement est entré en vigueur. Greg m’a clairement dit qu’il souhaite que le Québec pousse encore plus loin l’expérience du Colorado, afin d’agrandir la brèche et de faire tomber le mur de la prohibition avant que les décideurs en bâtissent un autre.

Par la suite, nous avons rencontré un contact qui m’avait été fourni par la revue Skunk. Toni Fox nous a accueilli au 3D Cannabis Center, un dispensaire accrédité et très professionnel dont le modèle complètement vertical permet de tout retrouver sous une même enseigne.

3D Cannabis Center

Nous devrions reproduire ce modèle au Québec dès maintenant, en fondant la première association québécoise des producteurs et des revendeurs de cannabis, qui défendra comme il se doit les producteurs et les revendeurs éthiques. Pour résumer ma pensée, les amateurs de cannabis devront agir avec plus de transparence avec le gouvernement, en déclarant leurs revenus et en payant leurs impôts. Ils devront déduire leurs dépenses et collecter les taxes de ventes comme tout autre entrepreneur légal. En somme, ils devront être irréprochables !

Sortir de ce « magasin de bonbons pour adultes » n’a pas été facile, mais il le fallait, puisque nous avions rendez-vous dans le tipi de Greg afin de célébrer notre rencontre. Une fois assis en rond, Greg nous a purifiés avec de la sauge avant de passer un joint. (Et voilà, le journaliste de TVA avait enfin sa séquence avec le chef du Bloc Pot en train de fumer un joint ! Ses patrons voulaient que notre voyage soit une fiesta continuelle de cannabis, mais sachez que j’avais d’autres objectifs en tant que chef du Bloc Pot.) En fait, consommer le cannabis est un acte social, qui peut regrouper des personnes de différentes origines dans un échange qui n'aurait pas nécessairement eu lieu autrement. Le cannabis est un lubrifiant social, et dans le tipi de Greg, ce joint représentait symboliquement le feu autour duquel nos ancêtres passaient leur soirée à discuter de leur chasse et de leurs rêves. Nous avons vécu un beau moment de partage.


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