Près de 200 000 personnes ont fait ce choix et sont devenues victimes d'une arnaque .

En 2023, le podcast Cannabis Cowboys de DW a fait état d'une énorme arnaque impliquant du cannabis médicinal.

Entreprises en Allemagne
Que révèlent les nouvelles découvertes sur l’arnaque au cannabis de JuicyFields ?

Andreas Becker | Nicolas Martin
12/03/20243 décembre 2024

En 2023, le podcast Cannabis Cowboys de DW a fait état d'une énorme arnaque impliquant du cannabis médicinal.

Aujourd'hui, des journalistes de plusieurs pays européens ont mené leurs propres recherches. Qu'ont-ils découvert ?

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Capture d'écran d'une vidéo du site Web JuicyFields montrant un groupe d'hommes masqués en train de fumer
L'arnaque à l'investissement dans le cannabis médical de JuicyFields a fait l'objet de la série de podcasts Cannabis Cowboys de DWImage : JuicyFields

En avril 2024, des centaines de policiers ont perquisitionné des domiciles et des bureaux dans 11 pays et arrêté plusieurs individus liés à JuicyFields, une société initialement basée à Berlin.

JuicyFields avait promis des bénéfices colossaux à ceux qui seraient prêts à investir dans le cannabis médical via son site Internet. Près de 200 000 personnes ont fait ce choix et sont devenues victimes d'une arnaque . Les procureurs estiment le préjudice à environ 645 millions d'euros (678 millions de dollars).

Le podcast Cannabis Cowboys de DW a été l'un des premiers à enquêter sur l'arnaque et a reçu de nombreux prix depuis la publication du dernier épisode en mars 2023.

Un réseau de journalistes d'investigation de plusieurs pays européens a enquêté sur cette affaire. Leurs conclusions ont été publiées par la chaîne publique danoise DR, le journal suédois Svenska Dagbladed , le journal autrichien Der Standard , et en Allemagne par le magazine Der Spiegel , la publication en ligne Correctiv.org et la chaîne de télévision publique ZDF.

De nouvelles découvertes soulèvent de nouvelles questions dans l'affaire JuicyFields

Les nouvelles recherches semblent confirmer l'histoire racontée par DW. Elles apportent également de nouvelles découvertes qui rendent la saga JuicyFields encore plus étrange qu'elle ne l'était déjà.

EP08 - Les Villages Potemkine

42:10
Le journaliste dominicain Kevin Shakir a par exemple réussi à entrer en contact avec l'homme soupçonné d'être le cerveau de JuicyFields. Sergej B., un ressortissant russe, a été arrêté en avril 2024 en République dominicaine et devrait être jugé plus tard en Espagne.

Selon les recherches de Shakir, un réseau autour de Sergej B. avait déjà monté deux autres affaires de fraude majeures avant JuicyFields. L'une concernait le recyclage des déchets, l'autre une cryptomonnaie. À chaque fois, de nombreuses personnes ont perdu beaucoup d'argent. Shakir raconte l'histoire de Sergej B. dans « Le Fantôme de Russie » , une série de podcasts en cinq parties en danois.

« Quand vous êtes capable de lancer des projets aussi importants avec autant de marketing, quand vous êtes capable de disparaître encore et encore des escroqueries présumées, quand vous êtes capable de déplacer des cryptomonnaies en grandes quantités et de manière sophistiquée », a déclaré Shakir à DW. « La question demeure : ce type [Sergej B.] agit-il seul ou fait-il partie de quelque chose de plus grand que lui ? »

L’État russe était-il impliqué ?

Gabriela Keller, du site d'investigation en ligne correctiv.org, s'est elle aussi interrogée sur la question. De nombreux experts de la Russie estiment que les escroqueries de l'ampleur de celle de JuicyFields nécessitent une protection politique.

Selon Keller, l'enquête n'a pas apporté la preuve à 100 % que l'État russe était impliqué. Mais certaines de ses conclusions suggèrent qu'il existe au moins un lien.

Par exemple, un membre russe du cercle intime de JuicyFields, Vitaly M., était enregistré à Berlin sous la même adresse que l’ambassade culturelle officielle de l’État russe, une institution appelée la Maison russe de la science et de la culture.

« Le fait qu'il ait été enregistré à la Maison russe pourrait indiquer qu'il y avait des assistants », a déclaré Keller à la DW. « Car pour enregistrer son adresse au bureau d'enregistrement, il faut soit un contrat de location, soit une attestation du propriétaire. »

Une photo du bâtiment de la Maison russe de la science et de la culture, à Berlin, en AllemagneUne photo du bâtiment de la Maison russe de la science et de la culture, à Berlin, en Allemagne
La Maison russe de la science et de la culture à Berlin — un homme lié à JuicyFields enregistré sous cette adresseImage : Schoening/imageBROKER/picture alliance

La Maison russe a nié avoir quoi que ce soit à voir avec Vitaly M. et a déclaré qu'il avait dû falsifier des papiers ou donner de fausses informations au bureau d'enregistrement des résidents.

En avril dernier, Vitaly M. avait échappé à l'arrestation. Il vit aujourd'hui en Russie, où il semble diriger une entreprise qui fabrique des drones, a déclaré Keller à la DW. « Le site Internet affiche actuellement les armoiries du ministère russe de la Défense, ainsi que le slogan : "La victoire sera nôtre". » Le rapport complet de Keller est disponible ici (en allemand) .

Un avocat suédois et ses revendications

Deux journalistes d'investigation du Svenska Dagbladet ont concentré leur enquête sur un homme qui n'a jamais été membre de JuicyFields, mais dont le nom est étroitement lié à l'affaire : Lars Olofsson, un avocat suédois.

Après la fermeture de JuicyFields à l'été 2022 et la perte de milliers d'investisseurs, Olofsson a annoncé qu'il pourrait aider les victimes à récupérer leur argent.

Au lieu d'attendre que les escrocs derrière JuicyFields soient condamnés, Olofsson a annoncé qu'il intenterait des recours collectifs contre tous ceux qui ont rendu l'escroquerie possible, y compris Facebook, où l'entreprise a fait de la publicité, et les banques qui ont transmis l'argent des investisseurs à JuicyFields.

Pour pouvoir participer à l'action collective, les investisseurs escroqués devaient payer une somme à Olofsson. Au début, elle s'élevait à 100 euros, puis à 150 euros. Plusieurs milliers de personnes se sont inscrites.

L'avocat suédois Lars Olofsson est interviewé pour le podcast Cannabis Cowboys de DW en 2023L'avocat suédois Lars Olofsson est interviewé pour le podcast Cannabis Cowboys de DW en 2023

L'avocat suédois Lars Olofsson a été interviewé pour le podcast Cannabis Cowboys de DWImage : DW

Frida Svensson et Erik Wisterberg ont passé Lars Olofsson sous la loupe, avec des résultats surprenants. Ils racontent son histoire dans un podcast en quatre parties intitulé « The Savior » (Le Sauveur) . Le podcast est en suédois et un article en ligne sur leurs découvertes est disponible en anglais .

« [Olofsson] se présente comme un avocat hors pair, fort de 15 ans d'expérience dans les enquêtes sur les fraudes et les escroqueries internationales. Il prétend être un ancien Navy Seal et avoir travaillé dans les services de renseignements militaires suédois », a déclaré Wisterberg à DW. « Mais rien de tout cela n'est vrai. »

« Son véritable passé implique qu'il a purgé une peine de prison pour des délits économiques. Il implique également qu'il a été à nouveau jugé cette année, ce que ses clients n'avaient absolument pas connaissance », a ajouté Wisterberg.

Quand les procureurs porteront-ils plainte ?

Les journalistes suédois ont déclaré qu'ils pouvaient prouver leurs allégations avec des documents et qu'ils avaient confronté Olofsson à leurs conclusions.

DW a également contacté Olofsson pour lui demander son avis. Il a répondu mais n'a abordé aucun des sujets sur lesquels il a été interrogé. Il a plutôt écrit qu'on ne pouvait pas faire confiance aux journalistes et a déclaré qu'il avait obtenu de nombreux nouveaux clients après le lancement du podcast « The Savior » en Suède.

Dans le podcast, Olofsson est présenté comme un soldat de fortune espérant tirer profit d'une arnaque. Il a engrangé des sommes considérables en frais d'inscription auprès d'investisseurs escroqués, tandis que les poursuites judiciaires qu'il a engagées contre JuicyFields ont été rejetées par les tribunaux suédois.

Les procureurs de Berlin, Madrid et d’autres villes évaluent actuellement le matériel confisqué lors des perquisitions d’avril 2024. Ils n’ont pas encore porté plainte.

Édité par : Nik Martin